Chapter 7: Chapitre 7
Cinq ans après être restée à l'étranger et avoir donné naissance à mon fils, j'ai reçu un appel de ma grand-mère adoptive. C'est elle qui m'a élevée. Je n'ai ni mère ni père, et je ne sais rien de ma famille biologique. Tout ce que je suis aujourd'hui, je le lui dois.
Ma grand-mère adoptive ne pouvait pas avoir d'enfant. Elle vivait un calvaire dans son propre foyer. Son mari, cruel et sans cœur, la méprisait. Sa belle-famille la rabaissait sans cesse. Ils l'injuriaient, l'humiliaient comme si elle n'était qu'un fardeau. Son mari, quant à lui, n'avait aucun respect pour elle : il la battait, il la blessait, et n'hésitait pas à ramener d'autres femmes à la maison. Il ne se cachait même pas. Elle n'avait pas d'intimité, pas de paix. Il osait avoir des relations avec ces femmes dans la même maison, dans la même pièce parfois, forçant ma grand-mère à tout entendre.
Ce supplice dura des années, jusqu'au jour où, alors qu'elle allait au marché comme à son habitude, elle entendit les pleurs perçants d'un bébé. Curieuse, elle s'approcha, le cœur battant. Elle trouva un nourrisson, seul, abandonné dans un panier, enveloppé dans une couverture légère. Il n'y avait personne autour. Le regard de ma grand-mère se posa sur l'enfant. À ce moment précis, son instinct prit le dessus. Elle ne réfléchit pas longtemps. Elle prit le panier dans ses bras, comme si elle avait attendu ce moment toute sa vie. Cet enfant, c'était moi.
Quand elle rentra chez elle, la tempête éclata. Son mari, furieux, l'accusa immédiatement. Il lui demanda d'une voix froide : « Pourquoi as-tu ramené ce bâtard ici ? » Et lorsqu'elle répondit que j'étais une fille, il l'accusa d'adultère. Il cria qu'elle avait eu une liaison en secret et avait accouché dans le dos de tous. Il ne voulait rien entendre. Pour lui, elle mentait. Il refusa de croire qu'elle m'avait trouvée. Ce jour-là, il la quitta. Il demanda le divorce et partit sans se retourner.
À partir de ce moment, la vie de ma grand-mère devint encore plus difficile. Elle se retrouva seule, sans soutien. Mais elle ne se laissa pas abattre. Elle travailla deux fois plus. Elle sacrifia tout pour moi : son sommeil, sa santé, ses désirs. Elle a tout enduré pour que je sois nourrie, protégée, aimée.
Clin ! Clin ! Clin !
— Allô Grand-mère !
— Allô ! Lidjy, comment vas-tu ?
— Je vais bien, grand-mère. Et toi ?
— Je vais bien, ma fille… Mais quand viendras-tu me voir ? Je n'ai encore jamais vu mon petit-fils en vrai. Quel mauvais enfant tu fais ! Tu m'interdis de voir mon petit Sleydjy. Et maintenant, je suis très malade… Tu sais, je n'ai personne pour m'accompagner. Je n'ai que toi. Pourquoi ne viens-tu pas ?
— D'accord, je vais réserver un vol pour ce soir. Tu pourras voir ton petit-fils dès demain, qu'en dis-tu ?
— C'est plutôt comme ça !
— Grand-mère, dis-moi… qu'a dit le médecin ? Même en étant loin, j'ai engagé une nounou pour toi, un chauffeur pour t'accompagner, et même un garde du corps. Chaque mois, tu passes un contrôle médical complet. Alors, comment as-tu pu devenir « très malade » si soudainement ? Ne me dis pas que tu n'es jamais allée à l'hôpital ?
— J'y suis toujours allée, ma chérie… Mais on vient de découvrir cette maladie. Et elle progresse rapidement.
— D'accord… Je suis au travail. Je te rejoins dès ce soir.
— D'accord, à plus tard.
Le soir venu, je prends le premier vol pour mon pays natal. Mon fils m'accompagne. Quand j'arrive enfin, grand-mère est toute souriante en voyant Sleydjy. Elle le serre longuement dans ses bras. Mais ce qui m'étonne, c'est de la retrouver chez elle…
— Grand-mère ? Pourquoi es-tu ici ? N'étais-tu pas censée être à l'hôpital ?
— Euh… bien sûr… Je… je suis rentrée. Le docteur a dit que je pouvais rentrer à la maison. Je dois juste y retourner dans une semaine.
— Tu en es sûre, Grand-mère
?
— Pour… pour… pourquoi je te mentirais, hein ? Je suis sérieuse.
Je la regarde. Son regard évite le mien. Sa voix tremble, elle hésite à chaque mot. Il est évident qu'elle me cache quelque chose.
— Grand-mère ?
— Oui ?
— Se pourrait-il que ta maladie soit… inventée ? Tu as monté toute cette histoire pour me faire revenir ?
— Q-quoi ? Tu racontes n'importe quoi ! Je ne comprends pas ce que tu dis…
— Grand-mère, je veux dire que tu n'es pas malade. Tu as tout inventé pour me forcer à rentrer de l'étranger.
(Silence…)
— Tu… tu l'as déjà compris ?
— Je viens juste de m'en rendre compte, grand-mère. Je ne savais pas que tu étais prête à jouer un tel tour… Tu savais que je serais inquiète si j'apprenais que tu étais malade.
— Et tout ça, c'est ta faute ! Blâme-toi toi-même !
— Comment ça, Grand-mère ?
— Si tu m'avais déjà présenté mon petit-fils, je ne t'aurais pas forcée à revenir. Je ne voulais pas te voir, Lidjy. Ce n'est pas toi que je voulais. C'est Sleydjy ! Je veux seulement passer du temps avec lui. Qui se soucie de toi ?!
Je suis blessée, mais je garde mon calme.
— D'accord, Grand-mère… Ne sois pas en colère. Blâme-moi si tu veux… J'ai pris trop de temps, c'est vrai. Mais regarde, je l'ai amené, non ? Sleydjy est là. C'est l'essentiel, n'est-ce pas ?
D'un ton un peu colérique, ma grand-mère me dit :
— Hmmm… Si je n'avais pas fait semblant d'être malade, tu ne serais jamais revenue. Je ne sais pas quand j'aurais eu l'occasion de vous voir tous.
— D'accord, grand-mère… Ne sois plus fâchée contre moi, s'il te plaît. Je vais rester ici avec toi, d'accord ?
— Tu n'es plus autorisée à repartir vivre à l'étranger.
— J'ai compris. Je ne partirai plus. Je resterai ici et je te tiendrai compagnie. Tu n'es plus en colère maintenant ?
— Hmm… ça dépendra de tes performances.
— D'accord...
Le lendemain, je me suis rendue chez Norvex Group pour postuler à un emploi. À ma grande surprise, on m'a directement proposé le poste de secrétaire personnelle du PDG. Je ne connais même pas le président de ce groupe. J'ai entendu dire que l'entreprise avait été récemment rachetée par une grande société, mais je ne sais pas laquelle.
J'étais sur le point de refuser, mais… on m'a annoncé un salaire de 2 millions par mois. Deux millions ! De quoi prendre soin de ma famille : ma grand-mère, mon fils Sleydjy… et moi.
Pourquoi refuser ? J'ai donc accepté.
Le premier jour de travail, je visite les lieux. Tout semble grand, moderne, impressionnant. Mais en arrivant devant le bureau du PDG, mon cœur manque un battement.
Qui vois-je ?
Mr Luc.
Quoi ? Lui ? Que fait-il ici ? Serait-il... le PDG de Norvex Group ? Est-ce que ça veut dire que Norvex Group appartient à Lazy Group ?
Dans quel pétrin me suis-je encore mise ? Oh mon Dieu… Pourquoi est-il partout ? Pourquoi me hante-t-il toujours ? Est-ce un fantôme ? Non… non, ce n'est pas possible.
Je me retourne, prête à fuir. Je dois partir d'ici au plus vite. Mais à peine ai-je fait un pas que le PDG apparaît.
— Où Mlle Maylidjy pense-t-elle aller ?
Un sourire moqueur au coin des lèvres, je lui réponds :
— Mr Luc… Tu es là ?
— Ça fait longtemps qu'on ne s'est pas vus, n'est-ce pas ?
— Oui… longtemps.
— Qu'y a-t-il ? Mlle Maylidjy n'espérait pas que je sois ici ? Tu es déçue de me voir ?
— Non, non, Mr Luc… pas du tout.
— Tu ne t'attendais pas à ce que ce soit moi, le PDG de Norvex Group ?
— Mr Luc est un homme brillant et très capable. Tu peux accomplir tout ce que tu veux.
— Vraiment ?
— Bien sûr.
Il avance lentement vers moi. Je recule, jusqu'à sentir le mur derrière mon dos. Il s'approche encore, et murmure à mon oreille :
— Ces cinq années passées à l'étranger… Mlle Maylidjy a dû beaucoup apprendre. Alors, je prendrai tout mon temps pour réapprendre… lentement… à te connaître.
Il se retourne calmement et va s'asseoir sur son fauteuil en cuir, le regard fixé sur moi.
— Maintenant que tu es ma secrétaire personnelle, tu dois obéir à mes ordres.
Si j'avais su que c'était lui, jamais je n'aurais accepté ce poste. Mais vu la somme astronomique qu'ils m'ont proposée… Je peux tolérer un peu son arrogance. Après tout, ce n'est pas tous les jours qu'on vous offre deux millions par mois pour simplement gérer l'agenda d'un PDG.
Je me suis donc lancée à fond dans mon travail, comme toujours. Je m'efforce de rester professionnelle, organisée, efficace. Rien à dire, je fais bien mon job. Mais une question me trotte sans cesse dans la tête : pourquoi a-t-il soudainement besoin d'une secrétaire personnelle ? Pendant des années, il n'a jamais laissé une femme s'approcher de lui au bureau. Il a toujours fonctionné avec un assistant personnel et un garde rapproché. Et maintenant, non seulement il engage une secrétaire, mais à un salaire hors norme ?
Il savait. Il savait sûrement que j'étais rentrée au pays. Il a tout orchestré. Et moi, comme une idiote, j'ai foncé dans son piège, aveuglée par l'argent.
Mais bon… Ce travail, bien que particulier, n'est pas vraiment difficile. Il est même agréable. Et tant que je peux m'occuper de ma grand-mère et de Sleydjy sans souci, je vais profiter. Juste un peu.
Un soir, vers 22 h, mon téléphone sonne. Qui peut bien me déranger à une heure pareille ? Je jette un œil à l'écran : "Mr Luc". Je fronce les sourcils. Qu'est-ce qu'il me veut ?
— Allô, Mr Luc ? Qu'est-ce qui se passe ?
Mais la voix à l'autre bout n'est pas la sienne.
— Allô, bonsoir. Êtes-vous Mlle Maylidjy ?
— Euh… Oui, c'est moi. Qui êtes-vous ?
— Je vous appelle du bar L'Eclipse. Mr Luc est ici. Il est complètement ivre.
— Hein ? Appelez son assistant, je ne suis pas sa…
— Son téléphone est verrouillé. Vous êtes enregistrée comme numéro d'urgence. C'est pour ça qu'on vous appelle.
Et clic. Ils me raccrochent au nez.
Quel culot ! Il va me rendre folle. Aller boire, s'enivrer comme un ado sans limites, et ensuite me déranger en pleine nuit ?
Et je ne suis pas sa femme, que je sache ! Il aurait pu enregistrer le numéro de son assistante ou d'un membre de sa famille, non ? Pourquoi moi ?!
Soupirant longuement, je me lève, enfile rapidement une tenue et fonce au bar.
Lorsque j'arrive, l'ambiance est feutrée, les lumières basses. Là, au fond de la salle, affalé sur un canapé, se trouve Mr Luc. Un verre à moitié vide à la main, l'air détaché, presque attendrissant. Je m'approche de lui.
— Mr Luc ! Je suis venue vous chercher.
— Hmmm…
— Allez, on rentre. Lève-toi.
— Je veux boire. Encore un verre… Apportez-moi un autre verre !
— D'accord, d'accord… Mais il n'y a plus d'alcool ici. On ira dans un autre bar.
— Impossible ! Ce bar ne peut pas être à sec !
— Tu veux encore boire ou tu veux qu'on parte ?
— Hmmhmm…
— Très bien, je te laisse ici.
Je fais semblant de me retourner pour partir. D'un geste maladroit, il me rattrape par la main.
— Reste… Je veux encore boire ! Je veux des milliers de verres ce soir ! Je veux m'ennivrer jusqu'à oublier mon prénom !
Je ris, moqueuse.
— Jusqu'à t'enivrer ?! Rensley Luc Dupont, tu veux dire que tu n'es pas encore ivre ?
— Hmmhmm non non… Je peux encore tenir. Donne-moi du vin ! Trinquons !
— Très bien, tu n'es pas ivre ? Alors viens, on va "boire" ailleurs.
Je l'aide à se lever, le tiens par le bras. Il s'appuie lourdement sur moi, l'air d'un grand enfant capricieux. Je le fais monter dans sa voiture et le ramène chez lui. Une fois arrivés, je le traîne jusqu'au canapé et le laisse tomber dessus.
— Voilà, mission accomplie. Bonne nuit, monsieur.
— Je veux de l'eau. Eau ! Apporte-moi de l'eau !
Je me retourne, exaspérée.
— Rensley ! Je ne suis pas ta servante ! Tu me prends pour qui ?!
— Tu ne peux pas désobéir à ton patron. Tu es ma secrétaire personnelle.
Même ivre, il continue de jouer au boss autoritaire. Avec un soupir résigné, je vais dans la cuisine et lui apporte un verre d'eau.
— Tiens. Voilà ton eau. Et si tu as encore besoin de quelque chose, appelle ton assistant ou… embauche une infirmière !
Mais ce qu'il dit ensuite me glace sur place.
— Je doublerai ton salaire mensuel. Mais reste avec moi… pour un moment.
Il le dit d'un ton mi-enfantin, mi-commandant, le regard pétillant d'un mélange de sincérité et d'alcool.
Je reste figée, le verre à la main, incapable de dire un mot.